Cinéma : Arrêtez-moi là, une dramatique erreur judiciaire


Le film dont vous allez lire la critique a été visionné dans le cadre d’un cours de Droit civil.

Gilles Bannier, réalisateur de la saison 2 d’Engrenages (Canal+), adapte sur grand écran le roman éponyme de Iain Levison. Il met en scène Reda Kateb, Léa Drucker et Gilles Cohen afin de raconter cette histoire inspirée de faits réels.

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Samson est chauffeur de taxi, à Nice. Lorsqu’il prend un charge une jeune femme à l’aéroport, il tombe sous le charme, mais se refuse de franchir la ligne rouge. Le soir même, la fille de celle-ci disparaît. Dès lors, les soupçons se portent sur Samson. Les preuves contre lui sont accablantes. Sauf qu’il est innocent…

Gilles Bannier adapte avec brio le roman de Iain Levison. Ou plutôt, il alerte l’opinion sur ces erreurs judiciaires aux conséquences dramatiques. L’histoire narrée dans le cas présent fait référence à un fait divers américain, dont l’accusé à tort est mort avant même d’avoir été innocenté. Le long métrage expose, pas à pas, les erreurs accumulées : tous les témoins n’ont pas été interrogés, l’enquête fut sommaire, bâclée, l’avocat ne faisait pas correctement son travail de défense… Le système judiciaire est fusillé pour son incompétence. Les policiers, la juge d’instruction, la Cour d’assisses, aucun n’est capable d’accepter son erreur et fonce tête baissée, coupable idéal entre les mains. Ils vont à la facilité. Ces faits mettent en avant une justice fatiguée, débordée (où les délais de procès vont de 3 à 6 mois, dans le film), une justice qui, faute de moyens, commet des erreurs destructrices.

Le spectateur, témoin de cette soirée où tout bascule, assiste, impuissant, à la descente aux enfers d’un innocent. Les différents maillons de la chaîne judiciaire interprètent comme bon leur semble les indices. Samson est entré chez sa cliente et a touché la fenêtre qui a servie pour l’enlèvement de la fillette ? Coupable ! Il a nettoyé à la vapeur son taxi le soir même ? Coupable ! Il n’a pas fait payer sa dernière course aux deux étudiantes ? Elles n’existent pas, coupable ! Or, la soirée décrite par la police, puis la juge d’instruction, puis la Cour d’assises, ne correspond en rien à la réalité. Samson est le coupable idéal. Il doit prouver son innocence, alors même qu’un juge d’instruction se doit d’instruire à charge et à décharge. Samson parviendra-t-il à se sortir de cette spirale infernale ?

Gilles Bannier signe ici un polar brillant, adapté du roman coup de poing de Iain Levison, inspiré lui-même d’une affaire sordide américaine datant de juin 2002*. Le portrait juste d’un innocent dont la vie a été broyée à coups d’indices douteux.

Arrêtez-moi là, un film de Gilles Bannier • Avec Reda Kateb, Léa Drucker, Gilles Cohen… • 1h30 • Disponible en DVD.

* Elizabeth Smart, 14 ans, avait été kidnappée dans la maison de ses parents. La police avait alors arrêté Richard Ricci au terme d’une enquête sommaire. L’homme n’avait pu prouver son innocence. Il est décédé d’une hémorragie cérébrale alors même que la jeune fille avait été retrouvée, indemne. La presse a salué le happy end, laissant de côté un homme mort, innocent, massacré par le système…

Arrêtez-moi là

8.8

Réalisation

8.0/10

Scénario

9.5/10

Dialogues

8.0/10

Interprétation

9.5/10

Pros

  • Des acteurs excellents
  • Mention spéciale à Reda Kateb en innocent détruit
  • Des personnages très bien écrits
  • Une reconstitution réelle du système judiciaire
  • Une belle adaptation du roman éponyme

Cons

  • Des longueurs autour de l'avocat

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